Entretien avec Hirokatsu Kihara :
À propos de la création de Kiki, la petite sorcière
Celluloïds conservés de Kiki, la petite sorcière.
Vous étiez le directeur de production pour Kiki, la petite sorcière. Nous avons appris que M. Miyazaki avait conçu le story-board sans scénario. Cela nous a surpris !
Le début de la conception de Kiki, la petite sorcière a été très compliqué. Nous n'avions que des esquisses des personnages et des idées principales, mais le travail sur le scénario et le story-board n'avançait pas.
C'est alors que M. Miyazaki, qui était à l'époque producteur, a été nommé réalisateur. Sunao Katabuchi (Dans un recoin de ce monde), le réalisateur assistant, et les trois directeurs d'animation Shinji Ôtsuka, Katsuya Kondô et Yoshifumi Kondô se rendirent tous les quatre en Suède pour faire du repérage pour la ville qui servirait de décor au film. Ainsi, le modèle de la ville de Kiki, la petite sorcière est Stockholm. La ville de Koriko, où vit Kiki, est basé sur Visby, une ville sur l'île de Gotland, à 30 minutes en avion de Stockholm.
Comme nous avions perdu trois mois à cause des problèmes concernant la conception de l'histoire, M. Miyazaki a commencé le travail sur le story-board sans scénario. Afin de se concentrer sur cette tâche, il n'a pas conçu un seul personnage. C'est à Katsuya Kondô qu'on doit le character design de tous les personnages.
Le story-board de M. Miyazaki était parfait. Bien qu'il intègre des histoires originales pour le film éloignées du roman original, le travail sur le story-board a été fluide et a pu se terminer sans avoir à rien changer. C'est grâce à cela que le film a pu être prêt à temps pour la date de sortie.
M. Miyazaki ne s'est pas rendu en Suède ?
Non. À l'époque il était producteur, donc il n'y est pas allé. Mais c'est lui qui avait décidé de faire les repérages en Suède.
Pourquoi avoir choisi Visby ?
Bien avant de travailler chez Ghibli, M. Miyazaki avait eu pour projet d'adapter Fifi Brindacier en série d'animation. Le projet n'avait pas abouti, mais il s'était rendu à Visby en repérage. C'est pour cela que le paysage de cette ville lui était resté en mémoire.
En haut : Une vue aérienne de la ville dont le celluloïd de Kiki a été enlevé. Le lieu est basé sur la ville de Stockholm, en Suède.
En bas : La ville de Koriko, où se trouve la boulangerie où travaille Kiki, est basée sur la ville de Visby sur l'île de Gotland (elle est connue pour ses toits rouges).
Le studio Ghibli a-t-il répété ce processus par la suite ?
Comme je n’ai participé qu’aux trois premiers films de M. Miyazaki, je ne peux rien affirmer avec certitude. Mais la manière de faire dépendant du réalisateur, je ne pense pas qu’elle ait été toujours la même. De ce que je sais, M. Miyazaki s’est chargé d’écrire le scénario uniquement pour Le château dans le ciel. C’est pour cela que je converse précieusement le manuscrit de ce scénario. (Remarque : M. Kihara nous a montré ce manuscrit mais il ne nous a pas autorisés à le photographier. Cependant, ce manuscrit est une preuve que contrairement à ce qui se dit, il est arrivé à M. Miyazaki d’écrire des scénarios.)
J’ai souvent été surpris par le travail de M. Miyazaki, mais ce qui m’a le plus surpris fut son travail sur le story-board de Kiki, la petite sorcière. Il n’a pas seulement conçu ce story-board sans scénario, il l’a fait dans un délai suffisant pour que le film puisse sortir à la date prévue. Même les experts de l’animation n’ont jamais dit de ce film qu’il manquait de mouvements de caméra et qu’il y avait trop de plans fixes. Le château dans le ciel contient un nombre similaire de scènes de vol, mais les mouvements de caméra y sont bien plus compliqués. Dans le domaine de l’animation, plus il y a de mouvements de caméra, plus c’est compliqué, et cela coûte aussi du temps et peut être la cause de nombreuses erreurs. Lorsqu’on utilise peu de mouvements de caméra et beaucoup de plans fixes, on peut utiliser les images formatées (sur papier ou sur celluloïd) telles quelles pour colorier ou filmer les celluloïds, ce qui permet de gagner un temps considérable.
Le génie de M. Miyazaki pour concevoir des story-boards apparaît clairement dans ce film. Il a réussi à créer une histoire passionnante à partir d’un story-board constitué d’une superposition de plans simples. Cela a permis de diminuer la charge de travail au moment de la finition du film.