Mis à jour : dimanche 19 juin 2022

Visite du studio Ghibli

Pour compléter notre présentation du studio Ghibli et de ses figures clés, nous vous proposons une visite virtuelle du studio, avec l’adaptation française d’un article publié dans le magazine japonais Brutus, à l’occasion de la sortie japonaise d’Arrietty, le petit monde des chapardeurs, en août 2010. Celui-ci se compose d’une infographie et d’un texte décrivant le fonctionnement au quotidien du studio Ghibli. Cet article a été publié une seconde fois, un an plus tard, toujours dans le même magazine, à l’occasion d’un dossier enrichi, consécutif à la sortie de La colline aux coquelicots, en août 2011.

Bien sûr, le studio Ghibli étant en perpétuelle évolution au gré de ses besoins de production, cet article ne reflète plus tout à fait la réalité (encore moins depuis son annonce de restructuration, début août 2014), mais donne néanmoins une bonne idée de ce qu’a pu être l’organisation générale interne du studio il y a encore peu de temps.

Visite guidée du studio Ghibli

Le studio Ghibli regroupe en tout 5 studios dans lesquels Hayao Miyazaki, Isao Takahata et leurs collaborateurs se déplacent en permanence. Voici comment s’agencent et s’intègrent à son environnement proche ces 5 studios, ainsi que l’aménagement intérieur du studio principal, le studio 1, réservé à l’animation, et celui du studio 2, réservé aux décors et au doublage.

Cliquez pour agrandir les images.

Statut juridique, fonctionnement et règles internes du studio Ghibli

« Est-ce que la source de la créativité du studio Ghibli provient de ses règles internes ? » s’interroge le titre original de l’article d’où sont tirées les informations qui suivent. Au final, à vous de vous faire votre propre opinion. Mais voici néanmoins un panorama du fonctionnement et des règles qui se sont mises en place au sein du studio pour ses salariés.

La création du studio Ghibli

Issue de la rencontre de Isao Takahata, Hayao Miyazaki et Toshio Suzuki, le studio Ghibli est créé en juin 1985. Son nom juridique exacte est Kabushiki Gaisha Sutajio Jiburi (Studio Ghibli Inc. ou société anonyme studio Ghibli).
En 1992, le studio Ghibli s’installe dans ses nouveaux locaux, à Koganei. En avril 2005, le studio quitte le giron de l’éditeur Tokuma Shoten, et marque le vrai début de la société en indépendant. C’est à cette occasion que le producteur Toshio Suzuki en devient le président. En 2008, il quitte sa fonction, et c’est Kôji Hoshino, ancien président de Disney Japan, qui le remplace.
Actuellement, 300 salariés travaillent pour le studio Ghibli.

Le nom du studio

Il se prononce « jibli », phonétiquement en japonais, mais il s’écrit « ghibli ». Il désigne un vent chaud qui souffle dans le désert du Sahara, en italien. C’était également le terme utilisé par les pilotes italiens pour nommer leurs avions de reconnaissance lors de la seconde guerre mondiale.
Le studio a été baptisé ainsi par Hayao Miyazaki. Ghibli se prononce « guibli » en italien. Mais le réalisateur ne s’en est rendu compte que bien plus tard et a continué à utiliser le terme « jibli ».

La répartition hommes/femmes

Au Japon, les femmes qui travaillent dans le milieu de l’animation sont souvent reconnues pour leur travail appliqué et soigné. Si on compte les salariées du musée Ghibli de Mitaka, au total, les femmes sont plus représentées que les hommes au studio Ghibli. Cette répartition est de l’ordre de 60 % de femmes pour 40 % d’hommes.
Hayao Miyazaki respecte beaucoup ses collaboratrices. D’ailleurs les toilettes pour femmes du studio et du musée Ghibli sont deux fois plus grandes que celles des hommes.

Le temps de travail

Il s’échelonne du lundi au vendredi, plus le samedi, une semaine sur deux. Les salariés se relaxent lors du déjeuner et au moment du Tea Time. Le déjeuner organisé le samedi midi est une des idées qui est apparue pour se détendre un peu plus. Les salariés se réunissent parfois aussi le dimanche au sein des clubs sportifs. Junichi Nishioka, le chargé des relations publiques puis de la promotion au studio Ghibli, vient parfois aussi le dimanche.

Carte de visite et matériel

Au studio Ghibli, se côtoient les métiers artistiques liées à la production de l’animation, mais aussi ceux des relations avec l’extérieur, comme les métiers de producteurs et d’attachés de presse. Seuls ces derniers ont droit à une carte de visite. Leur travail est séparé de celui de l’animation. Aussi, les animateurs n’ont pas besoin de carte de visite pour se présenter. Et d’ailleurs, Hayao Miyazaki n’en a pas non plus.
Les tables d'animation utilisées par les dessinateurs ont toutes été fabriquées par l’entreprise Idamokko, indique Junichi Nishioka.

Les changements de place de travail

Hayao Miyazaki pense qu’il est important de changer d’air. Aussi, les changements de place de travail sont fréquents au studio Ghibli. Après avoir achever un film, l’ambiance du studio devient lourde et ce changement de place est salutaire pour rafraichir les esprits. Cette règle ne s’applique pas qu’aux salariés en charge de la production de l’animation, mais aux administratifs également. En période de surcharge, c’est quand même un peu difficile, commente Junichi Nishioka.

Le déjeuner du samedi midi

Ce déjeuner est un moment où l’équipe de production s’octroie une petite pause pour se remotiver. C’est aussi l’occasion pour tous les salariés du studio Ghibli de se réunir au bar. La préparation du repas est à l’initiative des directeurs d’équipes de production. Il est préparé pour tout le monde et entretien la motivation. Récemment, ce sont les raviolis et le sandwich aux fruits qui ont eu du succès.
Hayao Miyazaki a déjà eu l’occasion de préparer des soba durant la production de Ponyo sur la falaise et a eu beaucoup de succès. Les exercices de prévention contre les catastrophes naturelles (incendies, séismes...) sont aussi pour lui une bonne occasion de préparer à manger pour tout le monde.

Les clubs sportifs

Baseball, tennis, cyclisme... Même si beaucoup de ses salariés travaillent dans les métiers artistiques, les clubs sportifs sont nombreux et très actifs au studio Ghibli. Il existe même un club assez original nommé Habu, qui signifie Hand Bell, dans lequel ses membres s’entrainent à jouer de la musique avec des clochettes. Les clubs montrent ensuite leurs progrès lors de la fête de fin d’année. Auparavant, il existait un club de Billy Boot Camp (entrainement militaire) qui a disparu.

Les voyages d’entreprise

Une fois par an, Hayao Miyazaki et le studio Ghibli organisent un voyage pour tous ses salariés. C’est un événement régulier. L’endroit le plus visité est Kyôto. Selon Junichi Nishioka, c’est parce qu’il s’agit de l’endroit préféré du producteur Toshio Suzuki. En 2009, ils sont partis à Hakone. Sur place, tous peuvent visiter librement et se retrouvent ensuite pour un repas.

Les rencontres au sein du studio Ghibli

Il n’est pas interdit de tomber amoureux au studio Ghibli (NDT : au Japon, il n’est pas forcement bien vu d’afficher une liaison avec l’un ou l’une de ses collègues au sein d’une même entreprise). Hiromasa Yonebayashi, le réalisateur d’Arrietty, s’est d’ailleurs marié avec l’une de ses collaboratrices. Une des raisons qui a poussé Toshio Suzuki à le choisir comme réalisateur était son justement cette attitude détachée lorsqu’il déjeunait avec sa future épouse sur le toit du studio.
Hayao Miyazaki est également marié avec quelqu’un du studio et adore entendre parler des ragots amoureux qui circulent entre ses collaborateurs.

La crèche La maison des trois ours

La maison des trois ours (San-biki no Kuma no Ie) est la crèche réservée aux collaborateurs du studio Ghibli.
Sa construction débute durant la production du film Ponyo sur la falaise. Le 30 août 2007, comme le veut la coutume au Japon, le studio Ghibli organise une petite fête pour marquer l’achèvement de la construction de la charpente de la future crèche. Elle ouvrira en avril 2008.
« Avant d'apprendre à un petit à lire et à écrire, il faut lui donner les moyens d'affronter l'univers » explique Hayao Miyazaki. « Notre crèche est une drôle de bâtisse dans laquelle il y a des trous, des escaliers, des échelles ; dans le jardin il y a des pierres, des creux, des bosses. Les enfants ont d'abord été un peu déstabilisés, apeurés, mais ils se sont adaptés, ils ont appris à se débrouiller et maintenant ils se sentent en confiance, ils s'amusent. »

A propos de la fondation de La maison des trois ours, la crèche du studio Ghibli, par Hayao Miyazaki (13 février 2007)

« Créons un endroit que les enfants vont adorer.
Un lieu où, même si ils vont s’y faire un peu trainer le matin, une fois la porte passée, ils deviendront joyeux et plein de vie.
Un endroit où leurs corps vont commencer à bouger naturellement : courir, grimper, glisser.
Un endroit où ils voudront toucher, saisir, et trainer les choses.
Un endroit avec des fissures secrètes dans les lesquelles ils voudront regarder et ramper dedans.
Un endroit où ils vont apprendre à utiliser un fil et une aiguille, faire et défaire des nœuds sur une corde, couper et coller, et démarrer et éteindre un feu.
Un lieu où, en faisant ces choses, leurs corps vont croître en harmonie avec leurs esprits.
Un lieu où les passants et les voisins seront ravis, où les enfants pourront profiter de délicieux snacks et repas, et que tout le monde voudra visiter.
Un lieu où, une fois ces enfants devenus adultes, ils se souviendront avec émotion et souhaiteront pour que les enfants autour d'eux puissent connaitre la même chose.
Voilà le genre d'endroit que nous rêvons de créer. »

Les relations tissées avec la ville de Koganei

Hayao Miyazaki est citoyen d’honneur de Koganei depuis 2008. Pour lui, le développement d’une ville est lié à la vitalité de ses enfants, et a notamment dessiné le personnage mascotte de la ville, Kokinchan, en se basant sur cette philosophie.

Depuis que le studio Ghibli s’est installé à Koganei, la société et la ville entretiennent de bons contacts. Quand le studio Ghibli organise sa fête de fin d’année, les petits commerçants de la ville y participent en créant leurs stands. Il est dit que le studio Ghibli participe au développement de la ville et que ses habitants le lui rendent bien.


Sources : magazine Brutus N° 690 (août 2010) - Turning Point: 1997-2008 par Hayao Miyazaki - interview de Hayao Miyazaki par Karyn Poupée, Live Japon (22 novembre 2008)
Remerciements : merci à Yasuka Takeda pour les traductions