Mis à jour : vendredi 11 mars 2022

Le château de Cagliostro : Origines

La franchise Lupin III

Les personnages de Rupan Sansei / Lupin III et ses partenaires ont été créés en 1967 par l'artiste et mangaka Monkey Punch (pseudonyme de Kazuhiko Katô). Ils comptent parmi les personnages les plus établis et les plus aimés dans le monde du manga et de l'anime.

Version américaine d'un des 314 épisodes du manga.

Lupin III est en partie inspiré par son aïeul français, Arsène Lupin, le gentleman-cambrioleur créé par le romancier Maurice Leblanc. Monkey Punch a adoré les romans et a décidé de faire de son propre personnage le descendant du légendaire voleur. Mais si Lupin III est bien une création de l'artiste japonais, le nom de Lupin, ainsi que l'histoire originale, sont la propriété de la famille Leblanc qui n'a pas hésité à faire valoir ses droits à plusieurs reprises.
Pour cette raison, le voleur de génie japonais a souvent utilisé des pseudonymes variés lors de sorties vidéos : Rupan III (inspiré par la prononciation japonaise) ou The Wolf (provenant de l'origine latine de loup : « lupus ») aux Etats-Unis, Vidocq en France, ou le plus connu chez nous, Edgar de la cambriole.

A l’origine un manga, Lupin III est devenu au fil des années une véritable franchise se déclinant sur différents médias : de nouveaux mangas repris par d’autres mangakas, plusieurs séries TV, films et téléfilms, ainsi qu’un film en prises de vues réelles, et de nombreux produits dérivé ou jeux vidéos...

Lupin III dans son premier costume vert. Celui-ci sera repris dans Le château de Cagliostro.
Et la veste rouge caractéristique du Lupin III de la deuxième série.

En 1979, lorsque Tokyo Movie Shinsha demande donc à Hayao Miyazaki de réaliser Le château de Cagliostro, la deuxième série TV continuait à être diffusée, aussi il est confronté à la pression du jeune réalisateur qui s'attaque à un monument de la culture populaire japonaise.
La principale contrainte était l'intégration obligatoire dans l'histoire de tous les personnages habituels de Lupin III : les fans n'auraient pas accepté de voir Lupin sans ses acolytes Jigen et Goemon, l'indécrochable inspecteur Zenigata et la belle Fujiko.
Néanmoins, étant en charge de l'écriture du scénario et du storyboard, Miyazaki disposait finalement d'une certaine liberté, dans les limites que lui imposaient les personnages. C’est ainsi l’occasion de constater que dès son premier long métrage, Miyazaki pliait déjà un univers et des personnages codifiés à sa propre convenance et affirmait ainsi une personnalité forte de réalisateur. Monkey Punch trouvera lui logiquement le résultat trop enfantin et trop éloigné de sa création.

« Hayao Miyazaki à une manière de travailler très destructive » explique Yasuo Ôtsuka, le directeur de l'animation du film. « Il trouve sa motivation dans le fait de casser le matériel original pour mieux tout reprendre à zéro, même si c’est lui l’auteur de l’œuvre originale. C’est aussi pour ça qu’il refuse de revoir ses anciens travaux. Il ne veut pas refaire la même chose. »

Inspirations

A cet effet, Hayao Miyazaki a utilisé les mythes de Maurice Leblanc et Monkey Punch, mais s'est inspiré aussi de sources historiques, littéraires et cinématographiques, qui toutes contribuent à enrichir et personnaliser le film.

Il existait réellement un escroc, courtisan de Louis XVI, qui se faisait appeler le comte Alessandro de Cagliostro. Leblanc a publié en 1924 un livre s'intitulant La comtesse de Cagliostro. Son héroïne, Clarisse, était la petite-fille du comte et allait plus tard épouser Lupin. L'idée d'un trésor noyé apparaît également dans un roman de Leblanc, La demoiselle aux yeux verts, en 1927.

Il existe également des réminiscences des écrits du romancier japonais Edogawa Ranpo et de son livre Yûrei-tô (La tour fantôme). Ce texte s’inspirant lui-même des écrits de Ruikô Kuroiwa, journaliste, romancier et traducteur (il a notamment traduit Le comte de Monte-Cristo et Les misérables en japonais). Preuve supplémentaire de l’influence de ce roman, en 2015, Hayao Miyazaki lui dédiera une exposition temporaire au musée Ghibli.

Le château de Cagliostro s'inspire aussi plus largement des vieux films de cabrioles qui offraient rires, cascades et romances. Notamment, les scènes d'ouverture, comme le cambriolage du casino, et de poursuite sur les toits un peu plus tard, rappellent le film To Catch a Thief (La main au collet) avec Grace Kelly et Cary Grant dans le rôle d'un gentleman cambrioleur sur la Riviera.

Miyazaki et Lupin III

Avant de réaliser Le château de Cagliostro, Hayao Miyazaki avait déjà croisé la route du personnage de Lupin III. Au tout début des années 70, lui-même et Isao Takahata sont appelés à la rescousse pour travailler à la mise en scène d’un certain nombre d’épisodes de la seconde moitié de la première série TV lancée par Tokyo Movie (futur Tokyo Movie Shinsha).
On leur confie le travail ingrat de faire remonter les taux d’audience en corrigeant, à partir de l’épisode 6, le travail de mise en scène et d’animation déjà entamé par le réalisateur Masaaki Ôsumi. Les épisodes du manga se prêtant mal à une adaptation directe en dessin animé, Lupin III a été plus ou moins « réinventé » dans cette série, aussi bien du point de vue du character design des personnages (plus arrondi et plus humain) qu'au niveau des histoires, moins crues et destinées à un public plus large et hétérogène.
Malgré ce changement d’équipe, la série sera tout de même interrompue au 23ᵉ épisode (sur 26 prévus). Edgar de la cambriole / Lupin III – 1ère série est une série incomprise lors de sa première diffusion car elle se distinguait totalement de la production animée enfantine qui dominait alors. Mais fait étrange, aussitôt retirée de l’antenne, les protestations du public affluent de tout le Japon. Par la suite, cette première série totalement jubilatoire finira par connaître la popularité et elle reste encore la plus appréciée du public japonais.

Ce n’est que quelques années après qu’une seconde série TV est lancée avec une équipe différente. De 1977 à 1980, 155 épisodes ont été diffusé sur les ondes hertziennes japonaises, en parallèle avec la deuxième série d'épisodes du manga de Monkey Punch et a connu un succès fracassant. La qualité du graphisme et de l'animation est corrigée. L'aspect comique, mais aussi le romantisme sont exaltés, au détriment de l'érotisme et de la violence, plus présents dans la première série.
Et c’est en 1980 que Hayao Miyazaki, sous le pseudonyme de Tsutomu Teruki, réalise deux épisodes inoubliables : l'épisode 145, Shi no Tsubasa Arubatorosu (Albatros, les ailes de la mort), axé sur la prise d'assaut d’un immense bombardier volant, et l'épisode 155, Saraba Itoshiki Rupan yo (Adieu, Lupin bien-aimé), qui marque la fin de la série et qui met en scène avant l’heure deux personnages connus du réalisateur.


Albatros, les ailes de la mort et Adieu, Lupin bien-aimé, l'univers de Lupin III à nouveau plié à la sensiblité de Miyazaki.