Panda, petit panda
Après Horus, prince du soleil, Isao Takahata est amené à quitter le studio d’animation de la Tôei. A sa suite, vous quittez les uns et les autres ce studio dans les années qui suivent, et vous vous retrouvez à travailler sur Panda, petit panda. Dans ces deux moyens métrages qui se suivent se joue là aussi un nouveau tournant dans votre compagnonnage commun.
Avant de vous parler de Panda, petit panda, je dois vous parler de pleins d’autres choses. En particulier d’un projet qui a été la raison de mon départ de la Tôei, qui s’appelle Fifi Brindacier, célèbre série de romans scandinaves pour la jeunesse. Après Horus, nous avions le sentiment partagé d’être parvenus à donner forme à ce projet, mais le film avait donné des résultats d’exploitation assez décevants, et la compagnie avait de ce fait un argument pour dire qu’on ne confierait plus de projet à M. Takahata. En interne, on sentait qu’il n’y aurait plus aucune autre chance qui nous serait donnée.
Et donc, lorsqu’on lui a proposé de réaliser cette série télévisée adaptant des récits pour la jeunesse de la littérature occidentale, il avait vraiment une approche cinématographique. Mais pour cela, il lui fallait s’adjoindre la collaboration d’un certain nombre de talents. Cependant, il pouvait synthétiser cette conjonction de talents nécessaires à 3 spécialités qui forment le cœur d’un projet cinématographique. Tout d’abord, la mise en scène, c’est à dire le travail du réalisateur. Le travail de la conception graphique de l’univers dépeint, le travail du directeur artistique. Et le rôle du directeur de l’animation, qui est à la fois de concevoir les personnages sur le plan graphique, et assumer la responsabilité de l’unité de leurs mouvements dans l’animation. Donc de s’assurer de filtrer le travail des animateurs pour les remettre au modèle. M. Takahata avait à l’esprit que ces 3 postes d’assurés pouvaient permettre de s’attaquer à un projet animé. C’est donc ce qui nous a réuni. M. Takahata à la réalisation, M. Miyazaki au layout, et moi à la direction de l’animation et la conception des personnages.
Nous sommes donc partis de la Tôei pour travailler sur ce projet de série. Et au moment où nous étions près à lancer la production, les contacts qui ont été pris auprès d’Astrid Lindgren, l’auteure originale, se sont soldés par un refus. Nous nous sommes donc retrouvés démunis et c’est dans ce contexte qu’est né Panda, petit panda.
Ces deux films, qui durent entre une trentaine et une quarantaine de minutes chacun, ne sont ni des longs, ni des courts métrages, mais des moyens métrages. Et pour les enfants, je pense que c’est peut-être la meilleure durée. Dans ces deux projets, on a bien sûr intégré pas mal d’éléments qui venaient de Fifi Brindacier qu’on n’avait pas pu mettre en forme. Sur ces films, M. Miyazaki a écrit le scénario, M. Takahata a assuré la mise en scène, et avec Yasuo Ôtsuka, ce mentor, ce très grand animateur qui est notre ainé, et moi, nous avons assuré ensemble la conception des personnages et la direction de l’animation.
Nous allons voir 1 extrait de Panda, petit panda : Jour de pluie au cirque (Panda Kopanda : Amefuri Sâkasu no Maki), moyen métrage de 1973.
Sur la scène de la découverte du village sous l’eau que vous venez de voir, il y a eu une répartition au niveau du travail sur les poses clés avec un jeune animateur, à l’époque, qui s’appelait Yoshifumi Kondô. Il a dessiné les poses clés de toute la partie où le papa panda grimpe sur le toit, va dévaler celui-ci et tombe à l’eau. Toute la partie au dessus de l’eau, c’est lui qui l’a animé. Et toute la partie sous l’eau, c’est moi qui m’en suis chargé. M. Kondô a ensuite travaillé avec M. Takahata sur Anne, la maison aux pignons verts (1979) dont vous pouvez voir un long métrage au festival cette année. Malheureusement, il nous a quitté il y a déjà une vingtaine d’année. C’était un très grand animateur.
Et je m’en souviens maintenant en vous en parlant, aussi bien M. Ôtsuka que M. Takahata, M. Miyazaki et moi-même, on avait tous de jeunes enfants qui commençaient à grandir et en âge de rentrer à l’école élémentaire. Nous étions portés par la joie de les côtoyer au quotidien et on travaillait vraiment sur ces films avec dans l’idée de retranscrire cette joie et de leur transmettre comme une sorte de cadeau.