Mis à jour : vendredi 7 octobre 2022

Pompoko : Art et technique

Graphisme et animation

Comme tous les autres dessins animés du studio Ghibli, le film bénéficie d'une réalisation technique très soignée. Les décors, réalisés par Kazuo Oga, sont dans la veine de ceux de Souvenirs goutte à goutte, donc magnifiques. L'animation n'est pas en reste. Le pouvoir de métamorphose des tanuki présente, outre un formidable potentiel comique, des possibilités inépuisables offertes en terme d'animation : il suffit de voir dans le film le nombre incalculable de transformations en toutes sortes de créatures ou d'objets pour s'en rendre compte.

Le défilé des Yôkai, créatures surnaturelles du folklore japonais, est l'exemple parfait pour constater la minutieuse fidélité des représentations du bestiaire fabuleux du pays et la très grande précision des références culturelles en générale.

Isao Takahata s’est par ailleurs inspiré de l’œuvre d'un spécialiste en la matière, le fameux dessinateur et mangaka Shigeru Mizuki, maître incontesté de l'horreur au Japon et auteur dans sa carrière de plus de 2000 illustrations de monstres et autres esprits. Takahata avoue ne jamais l’avoir rencontré, mais admire cependant l’œuvre de ce grand dessinateur, qui, à l’instar du studio, possède son propre musée au Japon.

Le Bakezôri, le fantôme sandale, un de ses monstres les plus célèbres de Shigeru Mizuki.

Un des points les plus remarquables au niveau des partis pris en animation est la mise en place d'une triple représentation des tanuki :

  • La première représente les tanuki de manière « biologique », tel que nous pouvons les voir dans la nature.

  • La deuxième, la plus utilisée dans le film, propose une vision anthropomorphique des tanuki. Elle permet au spectateur de mieux s'identifier aux personnages. Dans Pompoko, les tanuki sont censés vivre sous cette forme (debout, éventuellement habillé) quand les humains ne les regardent pas. Si les tanuki s'étaient tenus debout et habillés devant les humains, le film aurait ressemblé à un dessin animé familial « à la Disney » et connaissant le sérieux et la gravité des problèmes soulevés dans Pompoko, cela n'aurait pas fonctionné.

  • La troisième est une version simplifiée, plus « cartoonesque », copiée du manga de Shigeru Sugiura. Hayao Miyazaki adore l'œuvre de ce vieux mangaka. La première fois qu'il pense à faire un film sur les tanuki, il a en tête le manga 808 tanuki. Bien que Takahata ait d'autres idées que Miyazaki pour son film sur les tanuki, il veut lui aussi utiliser le design de Sugiura. Du fait de son coté caricatural à gros traits simplifiés, le réalisateur s'en sert comme variante « émotionnelle » de la représentation, apparaissant lorsqu'ils sont apeurés ou transportés de joie.

Ce traitement permet naturellement de varier le ton du récit et de passer instantanément du récit principal à un style documentaire ou, à l'opposé, à des moments d'émotions ou d'humour.

La musique et l'adaptation

Les musiques, confiées par Isao Takahata au groupe folklorique Shanshan Taifû (ou Shang Shang Typhoon), qui joue de toutes sortes d'inspirations, est marqué par la présence d'instruments et de formes musicales dits « traditionnels ». Les percussions sont dominantes et sont aussi bien utilisées pour les scènes d'actions que durant les moments de fête et de danse, nombreux dans le film. Le groupe interprète le thème principal du film, comme le fédérateur générique de fin.

Notons d'autre part que les warabe-uta (chants pour l'enfance) comme Shojoji no Tanuki Bayashi sont également légions. La chanson que Shokichi et Okiyo chantent lorsqu'ils jouent à la balle est Antagata Dokosa (D'où viens-tu?), une chanson enfantine pour les jeux de balles. Dans cette chanson, un chasseur tue les tanuki avec son fusil, les fait bouillir, les passe au barbecue et les mange. Une autre chanson, plutôt paillarde (et donc les enfants l'adorent!), parle de testicules de tanuki se balançant au gré du vent.

Au final, on est bien loin des thèmes orchestraux de Joe Hisaishi mais c'est justement à travers ce choix, très spécial, d'une bande originale sortant des sentiers battus que Takahata fait des films qui se distinguent.

L’adaptation française a par ailleurs fort bien réussi à retranscrire ses chants enfantins dans la langue de Molière. Sans sombrer dans un infantilisme à l’américaine, les traducteurs (dont l’inévitable Catherine Cadoux) et interprètes sont restés fidèles à l’esprit du film, sachant retranscrire la fraîcheur, la poésie et la joie de ces textes. Le même travail a été effectué pour l’ensemble de la VF. On sait que pour Takahata, cette retranscription est très importante, car, selon lui, un sous titrage pollue la vision globale du film. Tout comme lui, nous saluons donc ce véritable effort de traduction, qui permet d’apprécier l’œuvre dans son intégralité sans voir l’impression de perdre la force des paroles et pensées de nos chers tanuki !